Net Neutrality : Suite et fin de la réunion d’anciens combattants de la guerre de 3615

Reprise des débat un peu lente cette après-midi pour le colloque Net Neutrality de l’ARCEP. Bien moins animé que ce matin à l’exception de quelques interventions assez marquantes :

Celle de Maxime Lombardini qui n’aura pas manqué d’être l’occasion de quelques tweets acides sur le patron d’Iliad/Free et d’une pique d’Hervé Le Borgne (vice président de l’UFC Que Choisir) à qui on aura reproché d’être un peu misérabiliste se plaignant de taxes d’une fiscalité d’exception… et il n’a pourtant pas tout à fait tort (Taxes pour compenser la publicité sur les chaines du service public, taxe CNC, …). Outre ceci Maxime Lombardini a réaffirmé son opposition au rôle de gendarme que le gouvernement veut faire jouer aux FAI et s’est offert l’HADOPI en long en large et en travers, c’était particulièrement drôle, le patron d’Iliad n’a pas mâché ses mots, se raillant ouvertement d’une HADOPI bien loin d’être en mesure d’envoyer ses premiers emails d’avertissement. Autre information : aucun fond n’a encore été débloqué pour la mise en place des dispositifs, et Iliad n’est pas prêt de concéder la moindre avance … HADOPI, c’est donc pour 2012.

Et c’est justement avec le représentant de l’HADOPI, Jean Musitelli, qui nous a lâché un splendide et rogardien « La neutralité ne peut pas être l’alibi de l’illégalité« , que le débat a touché le fond et s’est transformé en réunion d’anciens combatants de la guerre du 3615, soutenu dans le débat suivant par le représentant du CSA à la recherche d’une légitimité nouvelle sur Internet. Légitimité qui à n’en pas douter sera appuyée par le gouvernement … il ne reste plus qu’à lui trouver un rôle.

Et c’est bien là la conclusion, beaucoup de choses se sont dites et on a de quoi avoir assez peur de ce qui risque d’en sortir une fois passé devant le Parlement. Plusieurs fois évoquée la notion d’Internet « Premium » me fait froid dans le dos, des intervenants n’ayant de cesse de faire des parallèles stupides avec le réseau routier et confondant le réseau avec leur voiture ! Peut-être garderons nous en tête que la publicité mensongère de l’Internet mobile illimité est en train de vivre ses dernières heures.

Ce colloque me laisse un arrière gout de frustration, comme si le gouvernement avait lancé une consultation pour poser des question auxquelles il a déjà des réponses et qu’il imposera : une régulation du réseau, une régulation des régulateurs et une Net Neutrality vidée de son sens. Evoqué également, cette transparence à laquelle peu de spécialistes peuvent croire, tant sur l’interconnexion que les dispositifs de régulation de trafic. La régulation amputera de fait des briques de réseau, car ce colloque a fait la monumentale erreur de convier moines copistes de DVD et anciens combattants de la guerre du 3615 avec leur conception toute particulière d’un réseau qu’ils ont de leur aveux du mal à définir.

Petits moments de réconfort tout de même pendant les interventions Catherine Trauttman et du sénateur Bruno Retailleau, brillant, maîtrisant bien son sujet et déclarant par exemple que « la liberté de choix est constitutive d’Internet » ou encore « La net Neutralité ne doit pas être négociable ».

Le Parlement a maintenant du pain sur la planche, il devra organiser la régulation, un rapport lui sera remis fin juin, espérons qu’il n’en profitera pas pour faire passer l’inacceptable pendant que les parlementaires seront en vacances.

A lire sur PCInpact « Milice moi tranquille« 

Colloque ARCEP sur la Net Neutrality

Aujourd’hui se tient le Colloque Net Neutrality de l’ARCEP. Les deux premières tables d’intervenants de ce matin étaient fort instructives. Ca va du très mauvais à l’excellent comme on s’y attendait. Passons tout de suite aux choses intéressantes. La seconde table ronde réunissait :

  • Stéphane RICHARD directeur-général de France Telecom
  • Benjamin BAYART président de French Data Network
  • Emmanuel FOREST vice-président et directeur général délégué de Bouygues Télécom
  • Matthew KIRK directeur des affaires publiques de Vodafone (Royaume-Uni)
  • Martin ROGARD directeur France de Dailymotion
  • Richard WHITT directeur des relations institutionnelles de Google monde (Etats-Unis)

Il y a eu deux temps forts :

Le premier étant comme on l’attendait l’intervention de Benjamin Bayart qui a lâché un pavé d’ampleur constitutionnelle en déclarant en réponse à l’intervention de Richard WHITT et surtout en réponse à  Winston MAXWELL avocat et lobbyste du copyright qui participait à la table ronde précédente : « La liberté d’expression est essentiellement en France un produit d’exportation« . Winston MAXWELL avait précédemment déclaré qu’aux USA, les débats sur la liberté d’expression passaient au second plan.

Second temps fort : l’intervention de Nathalie Kosciusko-Morizet, elle aussi attendue (et qui est arrivée fort en retard loupant la première partie des débats), déclarant que les internautes devaient accéder librement aux contenus « légaux ». Seul problème, pour qualifier sur un réseau un octet de légal ou pas, il faut mettre en place des mesures de filtrage, et plus particulièrement une technologie : le DPI (Deep Packet Inspection). Il y a donc un grand risque de voir cette technologie revenir dans les débats du parlement car NKM ne s’est pas cachée du fait que se colloque servirait au gouvernement à légiférer sur la neutralité des réseaux. On notera en revanche que NKM a réaffirmé son attachement à une neutralité au niveau des acteurs et met le doigt sur le développement vertical des acteurs du réseau.

Il s’agit, qu’on le veuille ou non d’une atteinte au fondement de la neutralité du Net : on a jamais demandé à la Poste d’achemenier uniquement des lettres « légales » car ceci impliquerait qu’elle ouvre le courrier des correspondants. Pourquoi accepter sur Net ce que nous n’accepterions jamais dans la vie réelle ?

Enfin, dernier point, je m’interroge sur la signification de la présence physique des membres de la HADOPI dans ce débat. J’y vois comme un très mauvais signal.

Suite des débats à 14h30, vous pouvez les suivre ici.

Neutralité du Net + Pascal Rogard® (SACD©) = ☠

Toujours suite à cette magnifique série d’interviews réalisée par l’ARCEP, en voici une qui a de quoi faire bondir n’importe qui. Même sans être internaute ou pire, « absolutiste de l’Internet » pour reprendre l’expression de Frédéric Mitterrand, on sent que Pascal Rogard s’empêtre dans le schéma désormais devenu un classique : celui du moine copiste de DVD Vs les internautes qui sont tous des voleurs et qui tuent des artistes … même s’il n’est toujours pas fichu de nous communiquer une étude sérieuse sur le sujet… vu que les études sérieuses et de sources indépendantes disent exactement le contraire… Même s’il ne veut pas entendre parler d’étude d’impact faisant le bilan de la débilité de la politique menée jusque là, j’ai nommé les DRM.

Avant toute chose, histoire de ne pas me qualifier de pirate absolutiste anonyme travestissant les propos de personnes de super bonne foi, je vous demanderais de visualiser avec attention cette vidéo.

On commence en plongeant directement dans la caricature grotesque, histoire de ne pas perdre de temps et de poser des bases solides à ce qui va suivre : «il y a ceux qui disent que tout doit circuler librement et qu’Internet est une zone de non droit». Ah… voici une première information interessante sur la perception que Pascal Rogard a du Net… Depuis quand la libre circulation de l’information fait d’Internet une zone de non droit ? La liberté d’expression fait-elle d’une démocratie une zone de non droit ? La libre circulation des personnes a t-elle fait de l’Europe une zone de non droit ? La vision de Pascal Rogard sur ce point me laisse pantois. Comment une personne d’apparence si instruite peut elle faire ce genre d’amalgame pitoyable ?

Maintenant que le ton est donné, tout y passe, à commencer par la plus grosse énormité que j’ai pu relever jusque là dans cette excellente série d’interviews de l’ARCEP: «le Net est destructeur de valeur pour la création». Comme je sais par ailleurs que Pascal Rogard est tout sauf un imbécile, on va mettre ça sur le compte d’un bon mot, d’une phrase choc, directement à destination des pouvoirs publics dont il abuse allègrement de l’e-gnorance pour obtenir le beurre, l’argent du beurre (pour ça c’est déjà dans la poche), et maintenant le cul de la crémière. Pour répondre simplement à Monsieur Rogard, je lui signifierais quelque chose qu’il sait parfaitement : si dans 2 ans son business n’est pas sur Net, c’est qu’il est appelé à mourir. Ne croyez pas ceux qui vous disent que mourir n’est pas facile. On notera également l’aberration économique qui est la confusion (volontaire) entre la notion de valeur et de profit financier… ou alors il faut m’expliquer par quelle loi anti-gravitationnelle un téléchargement d’oeuvre parvient à en réduire sa valeur. Parlons justement profit financier, comment les sociétés de gestion collective comptent expliquer ceci. C’est assez facile de crier à la crise à cause de l’Internet, de virer des salariés, et de s’octroyer de substantielles augmentations … c’est de la faute d’Internet ça aussi ? Ou c’était juste de petites augmentations pour fêter Hadopi ? J’y vois comme un certain contraste quand Pascal Rogard dit défendre la création … et les créateurs.

Puis, histoire de bien prouver à tout le monde qu’il ne sait pas de quoi il parle, Pascal Rogard affirme que : «non je n’ai pas de définition de la Net Neutralité, par contre je sais que la Net Neutralité ça peut pas être la Net impunité». Ca c’est la seconde phrase choc ! A traduire par « ce n’est pas parce que je ne sais pas de quoi on parle que je n’ai rien à dire ».

Sur la question des enjeux du débat : Pascal Rogard découvre le Net «le centre de la valeur sur Internet n’est ni chez les réseaux, ni chez les créateurs»… là encore pour répondre simplement à Monsieur Rogard, s’il y avait une centralisation de la valeur sur Internet, on appellerait ça le minitel. Internet, acentré, valeur aux extrémités du réseau, … Benjamin Bayart explique ça très bien, il serait de bon ton que Monsieur Rogard s‘instruise une petite heure pour éviter de dire ce genre d’ineptie.

Ensuite, on retrouve une idée que tout le monde s’étonnait d’entendre de la bouche de Nicolas Sarkozy : «c’est pour ça que par exemple je vais proposer la mise en place d’une taxe sur des entreprises qui font de la recherche et que je trouve que ces gens là ont beaucoup de ressources et financent peu la création» … Si besoin en était, on sait maintenant qui bourre le mou présidentiel … Pascal Rogard oublie un léger détail, il n’est pas élu de la République, il n’a donc rien à proposer en matière fiscale.

Pascal Rogard nous fait ensuite la splendide démonstration Myardienne, de manière fort habile, qu’Internet c’est le mal. Car vous ne le saviez peut être pas mais Pascal Rogard milite « en faveur de la protection de la vie privée« , et son Internet à lui, comme celui de Jacques Myard, le profile, le piste, le trojanise, l’oppresse, le viole et le vole… bref encore une personne qui confond Internet avec le tandem Windows/Internet Explorer (bien connu sous le nom générique d’ « aspirateur à spywares et autres virus »).  Et oui Monsieur Rogard, vous seriez surpris de voir à quel point « mon Internet à moi » est plus propre que le votre… Allez je vous donne une piste et une autre, et encore une autre pour encore plus de propreté.

On attaque ensuite un truc super en rapport avec la Net Neutrality  : «ceux qui piratent c’est quand même une énorme lâcheté, très très lâche, parce que  ce sont des gens qui sont cachés, ils ne seraient même pas capables d’aller voler quelque chose dans un magasin, ils utilisent des outils technologiques  (…) il m’interpellent dans les blogs et sont cachés par des pseudos (…) ce qui caractérise la piraterie c’est la lâcheté». Et hop, voilà qu’on nous ressert le couplet des internautes lâches et anonymes qui ne font rien que diffamer des gens toujours irréprochables. Vivement une police internationale de l’Internet, vivement une nationalisation de l’Internet !

Alors premièrement Monsieur Rogard, vous avez tendance à assimiler tous les internautes qui vous interpellent à des pirates, comme s’il fallait être un « pirate » pour relever les âneries que vous débitez à flux tendu et prendre la mesure de toute la mauvaise foi dont vous êtes capable. Et comme on n’en est plus à un amalgame idiot près, vous nous sortez le couplet réchauffé de l’anonymat très relatif des internautes qui vous interpellent. Etrangement, quand Nadine Morano veut savoir qui se cache derrière une adresse IP ou derrière un blog, elle y arrive.

Et quand on demande à Pascal Rogard ce qu’il attend, c’est avec un formidable aplomb qu’il nous lâche «j’attends que les lois de la République soient appliquées» … S’il n’y avait pas là une petite subtilité sémantique de votre part, nous serions parfaitement d’accord… mais non Monsieur Rogard, ce que vous attendez c’est qu’on fasse des lois rien que pour vous et que l’on tienne votre profession sous perfusion, c’est exactement ce que vous avez tenté de faire avec HADOPI 1, ce que vous avez réussi très partiellement avec HADOPI 2, ce que vous nous préparez avec HADOPI 3, et ce que vous venez de nous dire très explicitement avec votre « taxe Google ». Et le plus drôle là dedans, c’est que vous vous faites passer pour assez naif en émettant l’idée que des mails de l’HADOPI (Autorité que vous êtes au passage le seul à qualifier de  «compétente», ce qui ne manquera pas d’en faire rire plus d’un) puissent partir prochainement. Permettez moi d’écraser une larme, je vous garantis que c’est pas demain la veille … vu l’équipe de bras cassés qui rédige les décrets d’application ou qui va devoir se taper les spécifications du logiciel de « sécurisation » sans lequel aucun mail ne partira (rendez vous en juillet 2012).

Vous avez quand même le bon goût de conclure sur l’offre légale, mais quel crédit vous donner quand celle ci a été absente de l’intégralité des débats d’HADOPI 1 et HADOPI 2 ?

On vous a vu franchement plus en forme Monsieur Rogard.

Nadine Morano veut une police internationale de l’Internet

Commençons ce billet par une citation de Praagma :

[10:39]  <praagma> De mon expérience, sur les sujets techniques, les gens qui ne comprennent rien, se comprennent entre eux

On connait les positions bien tranchées de Nadine Morano sur Internet, elle n’en est pas à son coup d’essai. Il faut dire qu’elle n’en loupe pas une quand il s’agit de taper sur le Net sur lequel elle n’hésite pourtant pas s’exhiber comme dans ce pitoyable Lipdub (il y a des personnes pour lesquelles le droit à l’oubli devient vraiment vital).

Mais comme c’est le printemps, notre Nadine Morano, pimpante, invitée de Christophhe Barbier sur LCI nous livre une fois de plus le fond de sa pensée sur la rumeur, sur Internet qui amplifie cette rumeur et surtout sur la nécessité de créer une police internationale de l’Internet (contre la rumeur ?) … c’est original ça chère Nadine. On va finir par croire que vous avez suivi le même cursus que l’ami Jacques Myard. Et puis après tout, si on applique ce genre de chose à l’Internet, pourquoi pas une police internationale anti rumeur dans les bars ?

Ca devient assez exaspérant de constater que des politiques n’arrivent toujours pas à comprendre qu’il se passe sur le Net exactement ce qui se passe dans la vie réelle et que ce n’est pas en faisant des lois applicables uniquement à l’Internet que l’on rendra service à l’Etat de Droit.

Attention, tenez vous bien, je cite :

« J’ai toujours pensé que par rapport à ce monde du réel que nous avons et ce monde du virtuel qui maintenant existe dans nos vies, il nous faudrait nous organiser d’une manière internationale parce que Internet n’a pas de frontière, nous n’avons pas les mêmes législations, et ce qu’on y trouve est à la fois fabuleux et profondément dangereux et au delà des rumeurs bien entendu, des blogs qui sous couvert d’anonymat déversent un torent de boue et d’insultes d’injures et de mensonges je crois qu’il nous faudrait un jour une police internationale d’Internet. »

Afin que l’on ne m’accuse pas de travestir la vérité, je tiens simplement à vous faire visionner cette vidéo :

Net Neutrality : Le gouvernement consulte « enfin » les 5 gus du garage

Annoncé à l’instant via le Twitter de Nathalie Kosciusko-Morizet, la consultation sur la Net Neutrality est ouverte. Si vous aussi vous êtes un gus dans un garage, un professionnel du Net, un défenseur des libertés numériques, un activiste, ou tout simplement attachés à conserver un Internet ouvert et neutre vous êtes invités à venir vous exprimer sur ce thème. Niveau outil c’est un peu cheap, vous bénéficiez d’un joli document PDF et d’une adresse mail. Si toutefois, pour plus de sécurité, vous souhaitez utiliser la RFC 1149 pour répondre à cette consultation, vous êtes priés d’envoyer votre pigeon à l’adresse suivante :

Direction générale de la compétitivité de l’industrie et des services – STIC/SDRU
Le Bervil
12 rue Villiot – 75012 Paris Cedex 12


NKM prête à défendre la Net Neutrality … oui mais …

Le concept de Neutralité du Net commence à faire son chemin et il semble que des dirigeants commencent à s’en émouvoir. C’est en tout cas ce que laisse entendre Nathalie Kosciusko-Morizet dans cette interview accordée à Ecrans.fr. Notre secrétaire d’Etat à l’Economie Numérique se dit par exemple « fermement opposée à ce qu’un fournisseur d’accès puisse par exemple favoriser ses propres contenus via une intégration verticale » se dressant ainsi contre la stratégie de la majorité des fournisseurs d’accès Internet français. C’est assez courageux, bravo.

Seule ombre au tableau (on parlera plutôt de zone de floue), Nathalie Kosciusko-Morizet aborde le problème du blocage des sites pédophiles et de la régulation du trafic (le trafic shaping). Je ne vais pas revenir sur le blocage des sites qui diffusent des contenus pédophiles et de l’hypocrisie de cette démarche, mais sur la question qui est de savoir si un FAI doit ou non protéger son réseau afin que celui ci fonctionne, il est évident pour moi que la condition numéro pour la Net Neutrality, c’est un Net qui fonctionne, donc un réseau régulé en cas d’attaque massive… la question ne se pose même pas. En revanche, celle qui se pose, c’est la définition même du champs d’action et ce qui caractérise un réseau « en danger », et là, il convient d’être prudent et de bien définir le champs d’action de ces derniers. Le filtrage ou le blocage d’un protocole dans son intégralité reste une atteinte manifeste à la Net Neutrality s’il n’est pas motivé par une cause réelle et sérieuse (le seul coût de la bande passante en est il une ?).

Revenant sur la décision de la cour d’appel fédérale sur l’affaire opposant la FCC (l’ARCEP américaine) à Comcast, NKM rappelle que c’est la forme qui a été jugée et non le fond, comme expliqué ici, la question de la Neutralité du Net va très vite revenir sur le tapi au USA.

Sur la question d’HADOPI, je me permettrais simplement de rappeler à notre secrétaire d’Etat que le projet initial du gouvernement était de se passer du juge et que le compromis trouvé est très loin d’être satisfaisant, une ordonnance pénale ne laissant pas aux utilisateurs le loisir de se défendre dans de bonnes conditions. Pire, même le logiciel de pseudo sécurisation sans lequel les courriers d’avertissement ne pourront pas partir est une vaste fumisterie et ça commence à se voir sérieusement.

Tout ça pour vous dire que oui, madame la ministre, j’ai été surement un peu trop violent avec vous dans ce billet, et je vous dois des excuses à ce sujet. Même si défendre Hadopi reste à mes yeux une monumentale erreur de votre part.

J’ai mal à ma Net neutrality

Aujourd’hui, ce n’est pas une news qui me fait réagir mais 2. La première est issue de l’excellent billet de Fabrice dont je vous recommande vivement la lecture et qui épingle Orange comme il se doit … mais Fabrice est à mon sens encore trop gentil et nous allons voir pourquoi. La seconde est une décision de justice américaine qui piquote derrière les yeux.

Allez, c’est parti, on commence svp, par visionner cette nouvelle vidéo, suite d’une longue série thématique sur la définition de chacun de la Net Neutrality lancée par l’ARCEP (que je remercie au passage très chaudement pour cette initiative qui n’a pas finit de faire pisser du pixel). Dernier épisode en date, Stéphane Richard, directeur Général d’Orange, pour qui la Net Neutrality revêt une définition pour le moins assez singulière.


Heureusement que nous avons Orange pour nous faire un petit recadrage sémantique ! Puis c’est vrai ils sont un peu cons à l’ARCEP, ils parlent d’Internet Neutre alors que chez orange l’Internet il est « ouvert »… mais pas neutre … c’est une spécificité d’Orange, ne cherchez pas à comprendre.

Pour vous la faire courte :

  • Orange, Chine et Iran = Internet ouvert (n’importe qui peut se connecter  à un Net qui repose sur des protocoles ouverts… la classe, oui sauf que c’est tout sauf nouveau)
  • Reste du Net (sauf Chine et Iran) = Internet ouvert et neutre.

Rappelons que pour être « ouvert et neutre » (au passage si Internet était fermé on appellerait ça un Lan … AOL a essayé … AOL n’existe plus … CQFD) on ne doit pas assister à ce  mélange des genres entre FAI qui fournissent les tuyaux et producteurs de contenus… ça aussi, c’est une particularité française, merci Universal/SFR, merci Numericable, merci Orange, et dans une moindre mesure mais il a pas dit son dernier mot … merci Bouygues/TF1…

Sur ce point, Stéphane Richard a raison, l’Internet français est ouvert, mais il est loin d’être neutre, pour la bonne et simple raison que certains FAI sont de véritables rapaces et qu’ils n’ont rien trouvé de mieux que d’imposer leurs propres contenus à leur abonnés « en exclusivité », pour se faire des pépettes.

Maintenant, si vous me demandez si je trouve ça normal … je vous répondrais que non, je trouve ça malsain et honteux, mais encore une fois, le Net français, tu l’aimes ou tu te casses ! Inutile donc de me demander pourquoi ce blog est hébergé en Suède et pourquoi je compte délocaliser à terme tous mes sites. D’ailleurs, je m’amuse de voir que je ne suis pas le seul et que certains parti politiques en font de même ! Je vous rappellerais donc simplement une petite citation de Benjamin Bayart lors de la table ronde à la Cantine sur la Neutralité du Net : « Quand 10% de la population a envie de prendre le maquis c’est qu’on commence à vraiment être dans la mouise« .

Ce terme de neutralité, Orange ne l’aime pas, c’est d’ailleurs assez explicable, il y a certains signaux qui ne trompent pas. Vous ne voyez pas de quoi je veux parler ? Allez je vous aide … « En 2010, pour me remercier de mes compétences en matière d’Internet  et pour avoir appliqué en bon petit soldat la volonté présidentielle de faire voter un texte inapplicable, qui n’a ni queue ni tête et que je n’ai même pas réussi à faire passer du premier coup, je me vois confier un poste de responsable des contenus chez un grand FAI français, ce, afin de porter une nouvelle fois atteinte au principe de Neutralité du Net  … Qui suis-je ? … Bingo Christine Albanel ! Orange a inventé la Net Neuneutrality® .. exception culturelle quand tu nous tiens !

Comment voulez vous qu’un opérateur qui embauche une personne qui a prouvé qu’elle avait non seulement une incompétence manifeste sur ces sujets et qui en plus est à la solde des industries culturelles soit d’accord avec le principe de Net Neutrality ?

Revenons en à l’ami Stéphane Richard qui confesse volontiers ne pas être un spécialiste de l’Internet (là tout de suite comme ça, ma première réaction est de me demander ce que fout ce type à la direction générale du plus important FAI français … pas vous ?). Notez que le monsieur sur la video n’en ramène pas lourd non plus, « je ne suis pas un ancien dans les réseaux, je suis tout neuf », comprenez « j’y capte rien moi à Internet, j’ai été embauché pour faire de la thune alors venez pas me gonfler avec votre neutralité ». Et la thune, je la fais comme je veux, si je veux que mon FAI soit partenaire avec le Figaro, il ne m’apparait pas choquant que tous mes abonnés se voient interdire l’accès à d’autres journaux ou sources d’actualités en ligne… ou alors ils auront le droit mais ce sera payant… faire payer sur son réseau l’accès à une information gratuite sur tous les autres réseaux pour privilégier ses propres contenus, voilà une idée qu’elle est séduisante … bienvenue dans la vie.com avec Orange.

Assez trollé et si vous souhaitez lire des arguments sérieux « contre » la Net Neutrality, ce sont ceux avancés par Alexandre Archambault, responsable des affaires réglementaires chez Iliad, qui contrairement à monsieur Richard connait bien son sujet. Et encore, après bonne lecture, vous comprendrez que la position d’Alexandre, fort juste, ne va pas tant que ça contre la « bonne intelligence » d’une Net Neutrality responsable, cohérente, où toutes les parties seraient gagnantes, vous verrez en plus que c’est quand même dit avec une autre classe et une réflexion plus poussée que ce que nous sert monsieur Richard… Toujours suite à cet argumentaire d’Alec, je vous invite ensuite à lire la réponse de Benjamin qui vaut comme d’habitude son pesant de cacahuètes.

Ce qui nous mène au second point de ce billet qui est l’affaire FCC vs Comcast, un opérateur qui s’était fait taper sur les doigts car il s’adonnait à du trafic shaping un peu trop prononcé sur les réseaux P2P. Cette décision en appel n’a évidemment pas non plus échappé à Fabrice. L’affaire remonte à 2007, la FCC (Federal Communication Commission) qui est l’équivalent de l’ARCEP aux USA avait sommé Comcast, le Orange local, de ne pas s’adonner au filtrage des contenus au nom du priincipe de Net Neutrality. Elle gagna le procès contre l’opérateur en première instance marquant ainsi un point en faveur de la Net Neutrality. La cour d’appel fédérale a tranché, la FCC n’a pas le droit  d’imposer la Net Neutrality à Comcast. La décision en appel intervient à un moment particulier, car croyez le ou non, les USA sont un véritable désert numérique … aux USA, ils n’ont pas Free, ils n’ont rien compris. L’offre plafonne souvent à 5 mégas sur un réseau câblé vieillissant et la FCC lance un plan national en faveur du haut débit. La FFC comptait bien faire de la Net Neutrality une composante importante de son plan et pour qui connait Internet, on se rend vite compte que non seulement c’est la bonne méthode mais qu’en plus cette Net Neutrality est nécessaire pour qu’un accès au haut débit se fasse dans les meilleures conditions pour tous (et là je pense surtout accord de peering pour les petits opérateurs locaux qui pullulent aux Etats Unis). Cette décision est fort intéressante, car elle est à mettre en parallèle avec l’action de l’ARCEP dont on sait qu’elle n’a qu’un rôle consultatif … un peu comme une Haute Autorité sans autorité (oh c’est un peu facile … mais oui … comme HADOPI). Sauf  que contrairement à HADOPI, l’ARCEP a une utilité réelle et coûte au contribuable 10 à 50 fois moins cher. Si les avis de l’ARCEP sont consultatifs, ils n’en demeurent pas moins souvent fort respectés car guidés par la bonne intelligence, pour le bien commun et pour le bien des réseaux.

Attention, cette décision de la cour d’appel fédérale ne veut cependant pas dire que la Net Neutrality est morte aux USA, cette problématique reste au coeur des préoccupations des internautes américains comme des politiques qui se sont emparés de cette cause, flairant l’importance que ce débat revêt pour une démocratie saine. Il faut donc s’attendre à de nouveaux rebondissements sur ce dossier très sensible.

ACTA : une version de travail du traité publiée par la Quadrature du Net

acta suxLa Quadrature du Net a publié une version de travail du traité international anti contrefaçon négocié secrètement depuis 2007 entre les USA et différents états. Il y est question de repression des téléchargement illégaux et les USA plaident pour une HADOPI mondiale se passant de juge alors que de nombreux pays s’inquiètent de la mise en place d’une riposte graduée à la française. Un article y est d’ailleurs consacré sur Le Monde.

Le document fait une cinquantaine de pages et ne reflète peut être pas ce que sera l’accord final, il donne cependant les orientations des pays qui participent aux discussions. Le document est assez édifiant sur la position des USA qui en appelle même à la résurection des DRM que l’on pensait abandonnés pour toujours (c’est déjà le cas pour les industriels). Une répression accrue des auteurs de logiciels ou matériels permettant de contourner des mesures de sécurité est aussi au programme, et toujours ce spectre qui plane au dessus des fournisseurs d’accès Internet à qui les USA voudraient confier le rôle de police du monde en les responsabilisant sur les contenus qui transitent sur leur réseau.

ACTA va sensiblement impacter Internet, la neutralité du Net va en prendre un coup, c’est désormais une certitude, il faudra jouer de trésors de patience et de pédagogie pour expliquer à nos députés européens que ce qui se joue n’est ni plus ni moins l’établissement d’un cyber nouvel ordre mondial guidé par l’ultra protectionnisme américain.

Comment Nicolas Sarkozy a-til réussi à endormir la presse avec sa taxe Google ?

filtrageAh le moins que l’on puisse dire c’est que ça buzz …La taxe Google de Nicolas fait les choux gras de la presse, elle fait un carton niveau discussion de comptoir. C’est vrai que c’est drôle, ridicule même comme le souligne le Kosciusco Morizet qui a le droit de l’ouvrir. C’est même tellement énorme qu’on se demande si c’est une bêtise sortie en toute conscience et destinée à faire passer ce sur quoi tout le monde semble faire l’impasse :

Nicolas Sarkozy a appelé au FILTRAGE DU NET ! … et ça étrangement, dans la presse c’est loin derrière …

La taxe Google n’est pas prête de voir le jour, rien qu’en cela, elle ne mérite pas que l’on s’y intéresse réellement, même si le gouvernement avait l’indécence de faire perdre du temps aux parlementaires avec cette ânerie, elle serait de fait caduque car inapplicable et provoquerait surement des mesures de rétorsion économique de la part des américains. Pire, l’effet sur le tissu économique du Net (ouh ouh NKM vous êtes là ?) serait catastrophique, seul Dailymotion  dont le président n’est autre que Martin Rogard, fils de Pascal Rogard qui dirige la SACD et l’un des principaux artisans d’HADOPI, serait disposé à payer cette taxe. Dailymotion est l’une des rares entreprises dans le monde qui met plus d’entrain à censurer un extrait de quelques secondes des débats de l’Assemblée Nationale (des débats publics dont le tournage est financé avec de l’argent public) pour viol de droits d’auteur (et oui c’est une honte mais sachez que ces contenus sont soumis à droit d’auteur…) que les neo nazis qui appellent à la haine raciale sur son réseau.Tous les autres gros acteurs du Net (principalement les américains, quitteraient la France physiquement et continueraient à proposer des leurs services, qu’ils payent ou non cette nouvelle cyber dîme à Mon Seigneur Sarkozy. Et c’est là qu’on rigolerait, car j’attends le jour où l’Etat menacera de filtrer Google, Hotmail ou Yahoo … -90% de trafic mail, des entreprises au chômage technique … je crois que quelques terrabits de trafic convergeraient vers le site de l’Elysée pour une petite cyber manif (distribuée). La France n’a aucun moyen technique d’appliquer cette taxe… elle ne mérite donc pas de faire les choux gras de la presse … à moins que … ce ne soit qu’une diversion.

Revenons maintenant au nerfs de la guerre : le FILTRAGE… et bien Nicolas a réussit son coup, il passe quasiment comme une lettre à la poste, notez que depuis le retard parlementaire de Loppsi, le filtrage qui devait être appliqué comme une mesure anti-terroriste est maintenant appliqué aux sites de jeux en ligne grâce à l’ARJEL (passé là encore comme une lettre à la poste), et tend à être appliqué au téléchargement de biens culturels… une bien étrange digression qui nous amène on ne sait trop comment, en moins d’un an, d’une mesure anti-pédophiles et anti-terroristes à un champs d’application élargi à l’ensemble de la population et des contenus sur le Net…Je sais pas pour vous mais si je devais définir ce qu’est un état terroriste, je dirais que c’est un état qui use de la peur pour restreindre les libertés individuelles… exactement ce que propose actuellement la France.

Voici une splendide technique en matière de communication : sortir une énormité inoffensive pour masquer une autre énormité bien plus dangereuse. Le délire autocratique de Nicolas Sarkozy appelant au filtrage alors que le conseil Constitutionnel a promis de l’encadrer de manière drastique est un exemple supplémentaire de politique de forcing du président et de son jemenfoutisme à l’égard du concept de séparation des pouvoirs … Le roi a décrété que, sans délai, on allait faire du filtrage ! … gonflé le bonhomme.

Et à y réfléchir, j’imagine bien comment l’entourage du président lui explique comme c’est « simple de filtrer » en lui balançant des choses du style :

– filtrer c’est simple il suffit d’avoir des ordinateurs très puissants … ils l’ont bien fait en Chine (la Myard Touch).

– grâce au Deep Packet Inspection, on sait filtrer du contenu (c’est partiellement vrai, partiellement faux car ça nécessite une centralisation … mais aussi super dangereux et ça laisse la porte ouverte à de nombreux débordements naturels).

Mais croyez vous, qu’après HADOPI, de laquelle les artistes sortent grand perdants, que Nicolas par amour pour ces derniers, est capable de mettre plusieurs dizaines, voir centaines de millions d’euros sur la table pour couper l’accès à un site web qui propose des liens torrents ? Le croyez vous assez agité du bocal pour mettre en place un jouet onéreux au seul profit de la défense de la Culture Française alors que ce dernier pourrait aussi bien servir à des fins de distorsion concurrentielles et servir des intérêts plus « sensibles ».

Sans verser dans la parano extrême qui tend à dire que l’État cherche à tout contrôler sur Internet (il va vraiment falloir que l’on cause de Pericles ici un de ces quatres), il y a quand même des signes inquiétants. Il faut cependant relativiser ces signes en leur opposant la profonde méconnaissance de ces outils par les politiques à qui il faudrait plusieurs mois avant de comprendre ce qu’est une route statique et comment BGP fonctionne. L’explication est à mon sens plus simple :  le gouvernement Sarkozy est en campagne permanente, il est à la recherche de mesures bling bling, si personne n’y comprend rien peu importe, c’est même encore mieux car comme ça personne ne comprendra ce que ce gouvernement a détruit en prétendant protéger les « artistes ». le commun des électeurs comprendra juste que « Nicolas Sarkozy a sauvé la culture des pédo nazis d’Internet », c’est là le seul objectif recherché par ce gouvernement. C’est d’une inconscience et d’une bêtise rare car un outil de filtrage, c’est très compliqué, très puissant et … With great power comes great responsibility … une responsabilité dont Nicolas Sarkozy n’a manifestement pas conscience.

…  Je sens que nous allons très vite reparler du filtrage, d’ailleurs les pieds nickelés ont  promis d’y travailler et dans l’interview accordée par Jean Berbinau (HADOPI), on se rend compte de la méconnaissance que les membres de l’HADOPi ont du modèle australien et de ses nombreux ratés et des débordements qui ont conduit le gouvernement à filtrer de très nombreux sites qui n’ont rien à voir avec ce pour quoi le dispositif a été originellement mis en place (le filtrage des sites pédophiles). On apprend cependant que la HADOPI « négocie avec les FAI » .. et qu’ils ont un peu de mal … j’imagine parfaitement un Jacques Toubon causer configuration de Cisco Catalyst … pas vous ?

Pour conclure je vous confierais simplement que je trouve la demande du Président de la République scandaleuse, elle outrepasse sa fonction et fait fi du principe de séparation des pouvoirs. Le ton sur lequel a été lancée cette idée laisse entrevoir une tentative à peine voilée de créer une diversion réussie en annonçant une mesure irréaliste pour mieux faire passer de manière unilatérale une mesure bien plus réaliste et plus dangereuse que le Conseil Constitutionnel souhaite sous la stricte houlette du juge … et non de la Présidence. Les pays ou ce n’est pas le cas, étrangement, ce ne sont pas des démocraties mais des dictatures, ce simple fait mérite que nous méditions tous sur les « exigences » de notre présipaute.

Les pathétiques justifications de Jacques Myard sur la nationalisation d’Internet

frchinaComme je vous l’expliquais dans le billet précédent, Jacques Myard est du genre à creuser quand il a touché le fond … et il le prouve dans un momumental billet sur son blog où il revient sur ses déclarations, les justifiant par des raisonnements d’une autre planète.

Monsieur le député, vous ne l’aurez pas volé, voici la réponse que mérite vos positions.

« Nationaliser Internet ! Et vive la polémique !

Fallait pas commencer ! En tout cas, vous aurez réussi à faire parler de vous.

Sur Radio Courtoisie, Jacques MYARD a évoqué la nécessité de «nationaliser Internet ». Ces quelques propos suscitent un buzz médiatique et font le tour de la Toile. De quoi s’agit-il ?

D’une énormité … et on va vous expliquer pourquoi.

Tout d’abord, il faut se féliciter de la sensibilité des uns et des autres à propos d’un Internet mythique qui appartiendrait à tout le monde.

Mythique … voyez vous ça. Visiblement, la notion même d’Internet vous échappe totalement, pour vous la faire courte, il s’agit d’un réseau acentré reposant sur des protocoles ouverts et neutres, chaque noeud du réseau apporte de l’intelligence, en celà, l’Internet appartient bien à tout le monde, c’est un fait, mais pour savoir celà, il faut le pratiquer et non le consommer comme cette petite phrase anodine mais très révélatrice, nous donne une indication sur la pratique que vous en avez…

Il est certes un moyen d’information désormais incontournable, mais bien souvent aussi un moyen de désinformation, que des Etats et leurs services spéciaux n’hésitent pas à utiliser.

Vu sous cet angle, vous avez raison monsieur le député, d’ailleurs la pratique française est d’une bêtise rare et précieuse, ou alors il s’agit de trésors d’hypocrisie déployés pour faire passer la France pour un pays de Hippies, mais permettez moi de sourire. Faites croire à qui vous voudrez que la France ne s’adonne pas aux techniques d’info guerre, mais pas à moi.

« Nationaliser Internet » ne signifie en aucun cas créer une police des échanges entre particuliers, sous réserve de la diffamation ou la violation des droits d’auteurs. Nous sommes un Etat de droit.

Nous y voilà, les deux pieds dedans : la diffamation, le droit d’auteur … puis l’opposition politique, la divergence d’opinion, l’incompatibilité d’humeur (j’entends sonner les sirènes du CSA et de la labellisation des sites web, pas vous ?)… et que faites vous de la pédophilie et de la cybercriminalité ? La protection de l’enfance c’est pas grave ça, bloquer les circuits financiers bien connus des cyber mafias c’est pas à votre portée ça … en revanche, protéger les intérêts des moines copistes de DVD et vous assurer que vos opposants ne fassent pas trop de bruit, ça c’est important ! Votre justification est effrayante monsieur le député : une police des échanges … commencez par donner les moyens à la police et à la gendarmerie de lutter contre la pédophilie et la cybercriminalité si vous voulez être pris un tant soit peu sérieux.

En revanche, il faut savoir qu’Internet fonctionne par l’attribution des DNS (Domain Name System) aux différents opérateurs, sorte de routeur central du système, lequel est totalement aux mains d’une société américaine, l’ICANN, laquelle est elle-même le faux nez du gouvernement américain.

Là encore, vos informations sont incomplètes, vous assimilez une institution tout à fait respectable, l’ICANN (une organisation de droit privé à but non lucratif), au gouvernement américain, en omettant de préciser que l’ICANN et ses satellites régionaux sont un modèle de neutralité, valeur sur laquelle le Net s’est construit. La résolution des DNS et leur acheminement vers des adresse IP est nécessaire au niveau mondial, il va falloir que vous nous expliquiez par quel raccourcis technique vous parvenez à penser qu’en nationalisant l’Internet français vous allez pouvoir vous passer de la résolution des noms de domaines étrangers et surtout en quoi cela va nous mettre à l’abris du risque d’écoutes inhérent à TCPIP par des tiers étrangers… laissez moi deviner, vous allez whitelister les domaines étranger et autoriser ou non les serveurs DNS root français de résoudre tel ou tel domaine étranger… euh … non mais sérieusement …comment vous dire ça poliment… ça ressemble à s’y méprendre à une Albânerie vu d’ici. Vous parlez de la Chine, mais connaissez vous le nombre de fonctionnaires que l’armée emploie pour un résultat assez ridicule vu que tous les chinois contournent le firewall en un simple clic sur une extension Firefox ?

Cela signifie que les États-Unis sont totalement maîtres du système et peuvent ainsi espionner le monde entier, pour leur propre sécurité, mais aussi pour leurs intérêts industriels ou commerciaux.

Je vous rassure, nous aussi on sait le faire et on ne s’en prive d’ailleurs pas. Je vous invite à vous rapprocher des services compétents, même si notre frenchlon à nous est un peu flouté sur Google Maps, il existe bel et bien… Vous n’étiez pas au courant peut-être ?

frenchlon
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Ils savent, eux, ce qu’est l’intelligence économique.

Et oui, nous c’est avec l’intelligence qu’on a du mal, pas vraiment avec l’économie.

De surcroît, le logiciel du principal système d’exploitation est truffé d’erreurs permettant de multiples attaques de hackers qui peuvent paralyser des systèmes entiers, allant des hôpitaux aux centrales nucléaires, en passant par les médias.

Dieu ce que je suis d’accord avec vous sur ce point ! Et bien changez de système d’exploitation, interdisez Windows ! Nationalisez Mandriva !

Le cas de l’attaque russe sur l’Estonie en avril 2007 ou encore la tentative chinoise de blocage des bases de données du gouvernement allemand en mai 2007, alors même qu’Angela MERKEL se trouvait en visite officielle à Pékin, en sont des exemples développés dans le rapport d’information n°2085 (page 203) des députés Jacques MYARD et Jean-Michel BOUCHERON « Les enjeux géostratégiques de la prolifération ».

Avec des administrations qui tourent encore sur Windows 2000, ou les serveurs percés d’une institution de normalisation française bien connue qui offrent au Net les documents confidentiels envoyés par des entreprises ou le mot de passe en clair de leur  base de données accessible via un simple navigateur … moi, je serais vous, je commencerais à faire le ménage avant de crier au piratage et j’instaurerais un délit de négligence caractérisée pour nos administrations françaises. Les « pirates » ont bons dos monsieur le député.

Il est donc indispensable de maîtriser ce réseau qui échappe aujourd’hui totalement à la France et aux Etats européens.

C’est surtout à vous qu’il échappe.

L’une des solutions, avancée par Louis POUZIN, inventeur du principal protocole de l’Internet, le TCP/IP, serait que la France maîtrise ses DNS et crée des espaces de confiance au sein d’Internet qui échapperaient à toute tentative d’intrusion ».

Faire confiance à qui ? A des agents assermentés ? A une haute autorité ? Qui m’assure que la résolution des domaines se fera en toute transparence alors que vous projetez ouvertement de mettre en place des DNS menteurs ? Qui me garantit que mon blog existera encore si vous mettez vos projets à execution, que deviendra ma liberté d’entreprendre ? Non merci, je ne veux pas vous faire confiance, pas après la lecture de votre argumentaire surréaliste.

Cette « nationalisation » d’Internet, loin de porter atteinte à la liberté de communication, va au contraire la renforcer.

Monsieur le député, j’ai entendu vos arguments, je les trouve affligeants tant techniquement que politiquement et vous entendre parler de liberté de la communication après une telle démonstration relève plus d’une blague de comptoir que d’une proposition politique sérieuse.

Jacques MYARD entend déposer une proposition de loi en ce sens. »

Ca aura au moins le mérite de nous faire passer pour des abrutis finis dans le monde entier (ça rigole jusqu’en Suède d’ailleurs), merci monsieur le député de couvrir de honte le pays des Droits de l’Homme.

A passage, puisque les DNS vous fascinent tant, je vous suggère de commencer par configurer correctement votre nom de domaine. J’aurais beaucoup aimé poser un lien sur votre billet, mais ceci est impossible … permalink / redirect à la racine… les bonnes pratiques du Net on se doutait bien que ce n’était pas trop votre truc mais là vous enchaînez les FAIL.

** Edit : on me souffle dans l’oreillette que ce sont de vilaines frames toutes sales **