Dans un article publié ce matin même, Numerama revient sur les errements de la commission Zelnik sensée rendre un rapport au gouvernement en vue de la préparation d’HADOPI troisième du nom. Le problème d’HADOPI, c’est qu’à force de fausses couches et de consanguinité, on arrive vite à un texte à l’ADN mutant.
Pourquoi la commission qui devait rendre son rapport en décembre 2009 a t-elle pris autant de retard ? Vous allez me taxer de mauvaise langue mais je me demandais si à tout hasard, cette commission n’attendait pas les décrets d’application d’HADOPI pour mettre en œuvre une stratégie toujours basée sur le même triptyque (le beurre, l’argent du beurre et la crémière) :
1° Je fais un beau coup de violon pour expliquer que les pirates égorgent les artistes et revendent leurs organes sur Ebay pour en faire des sacs contrefaits Louis Vuitton. Je demande plus de fermeté à l’égard de ces criminels et j’appelle au filtrage BGP.
2° J’explique que mon business va mourir, que je ne peux plus signer d’artistes et que même si mes bénéfices et mon chiffre d’affaire sont en nette hausse « faut pas se fier aux chiffres, on leur fait dire ce qu’on veut ».
3° Je demande une aide de l’Etat (même en bonne santé, une perfusion ça ne fait jamais de mal) sous forme de crédit impôt ou de crédit à la consommation, de « chèque cadeau pour les produits culturels numériques », des sortes de tickets de rationnement pour aller faire la queue devant une caisse de FNAC ou un cinéma… et hop je conserve le coup de la taxation des FAI sous le coude « Au cas ou HADOPI 3 ne marcherait pas » (parce que figurez vous qu’ils ont cru un jour que ça fonctionnerait !).
Pour tout vous dire, je soupçonne cette industrie d’être tellement maligne et inquiète des retards parlementaires pris qu’elle essaye de faire jouer le calendrier en sa faveur. Vous allez voir que si les décrets sont censurés, ou tout simplement inapplicables (comme c’est de toutes façons le cas), le rapport de la Commission Zelnik pourrait tout à fait être en mesure de revenir sur l’abandon de cette taxation. Donc en attendant, on souffle un peu le chaud et le froid, sans trop rien dire, en guettant le Journal Officiel pour savoir quelle réponse technique et financière préconiser pour HADOPI 3.
Le fond du problème, c’est que la commission Zelnik est tétanisée, car elle se rend compte, peu à peu, que la fin des téléchargements, c’est pas demain la veille. Préparer HADOPI 3 c’est être au bord du gouffre et faire un grand pas en avant, du coup on tente, comme un mauvaise élève, de regarder par dessus l’épaule du voisin avant de rendre sa copie. Autre raison plausible, des accords confidentiels entre les ayants droit et le gouvernement ont été conclus et ce dernier aurait promis des petits aménagements dans ses décrets d’application pour compenser le retard pris suite à l’échec HADOPI 1, connue aussi sous le nom d’Epic Fail. Les premiers décrets publiés officialisent la création de la Haute Autorité vachement indépendant (y’a qu’à voir le pédigrée … je vous parlais de consanguinité tout à l’heure … le premier résultat c’est un problème de dyslexie arithmétique qui a poussé 9 gus à investir 1107 m2 dans le 14e arrondissement de Paris). Mais le plus gros des décrets, ceux où la pilule risque d’être plus compliquée à faire passer, concerne l’application technique et définit les procédures. Ce sont les décrets de tous les risques, ceux ou il est impossible de faire quelque chose de cohérent tant le texte est en décalage avec la réalité d’Internet, tant les chiffres ont été bidonnés.
Si vous suivez mon raisonnement, vous allez vite comprendre que la commission Zelnik cherche à regarder par dessus l’épaule du plus mauvais élève de la classe… et elle en est consciente. Dans son état de panique et de psychose, elle est très disposée à faire n’importe quoi, donc elle est prudente. Aujourd’hui (ça ne sera probablement plus le cas une fois la pilule HADOPI 2 avalée), la taxation des FAI selon elle, « parasiterait le message », un doux euphémisme pour qualifier ce vol organisé à la redistribution particulièrement opaques (on ne serait pas étonnés qu’elle alimente quelques caisses noires) qu’est la taxation des supports vierges légalement désignée comme « taxation pour la copie privée » … si on vous taxe pour de la copie privée c’est bien qu’elle est légale non ? Et bien non, on vous taxe pour copier de manière privative un cd que vous avez déjà … au cas où vous voudriez faire un backup … c’est bien connu. Si vous avez du mal à comprendre la logique implacable de cette taxe, selon la commission Zelnik, il n’y a aucune chance que les internautes comprennent qu’une taxe sur le chiffre d’affaire des FAI ne soit pas purement et simplement une licence globale avec un nez rouge et donc … une invitation à télécharger.
Le message est brouillé depuis longtemps entre l’industrie des biens culturels et les internautes. Ces approximations, ces hésitations, ces contre-temps à répétition, attestent qu’HADOPI 3 sera une nouvelle bataille de tranchée avec deux camps qui s’opposeront, l’un caricaturant l’autre, qu’une fois de plus les artistes seront les grands perdants, qu’une fois de plus les solutions techniques visant à combattre des usages numériques sont nulles et non avenues. On s’oriente donc inéluctablement vers une surenchère des mesures répressives avec des réponses des internautes chaque fois plus violentes… c’est triste.
Image récupérée sur http://www.cetace.org
le fait que tous les supports ou dispositifs d’enregistrement ou de reproduction de contenu audio/vidéo soient taxés au nom de la copie privée et/ou de la protection contre la contrefacon est déjà en soit un blanc seing au « piratage » ! alors, un peu plus, un peu moins … ca n’est pas HADOPI 3 qui va changer grand chose. l’Autre manière de ne pas sembler passer pour un c.. est de voter la loi à grand renfort de comm gouvernementale et de la laisser mourir en ne signant pas le décret … ca ne serait pas la 1er fois !
J'aimerai partager votre optimisme : http://bluetouff.com/2010/01/08/filtrage-du-net-l…