Laure de la Raudière (UMP) en croisade contre l’E-gnorance ?

Le temps des godillots serait il définitivement révolu à l’UMP ? Laure de la Raudière, député UMP d’Eure-et-Loir et secrétaire nationale de l’UMP en charge des médias et du numérique est sortie des sentiers battus. Dans une interview accordée à ITespresso Laure de la Raudière, par ailleurs diplômée de l’Ecole Normale Supérieure et ingénieur en chef des télécommunications. Je vous propose de revenir sur les nombreux temps forts de cette interview (je remercie Niko au passage de me l’avoir signalé et ITespresso d’avoir débusqué Laure de la Raudière qui redonne un peu confiance en l’avenir).

Au sujet du positionnement politique de l’UMP à propos de la loi HADOPI :

Laure de la Raudière n’y va pas par 4 chemins, elle est clairement contre la solution qui a été apportée par le gouvernement au problème des pertes de revenus des industries de la culture.

  • « la loi a été conçue dans le domaine de la culture pour protéger la propriété intellectuelle (…)« 
  • La riposte graduée : « l’avertissement que ce qu’ils font est illégale me parait  intéressant, (…) en revanche la loi qu’on a voté avec la coupure d’internet ne me parait pas pertinent , je vous le dit assez honnêtement, moi je n’ai pas voté la loi » (…)
  • « elle ne résoud pas le problème du téléchargement illégal ».
  • « il ne faut pas légiférer trop vite ».
  • « ça ne sert à rien de se battre contre Internet ».
  • « il faut accompagner nos industries traditionnelles »

Un petit regret concernant l’offre légale dans ses propos, Laure de la Raudière parle de pertes de recettes sans toutefois, comme d’habitude, établir une corrélation cohérente entre le téléchargement et la perte de revenus des moines copistes de DVD (encore une fois, toutes les études tendent à dire le contraire, phénomène évidemment explicable par la crise économique et financière … et oui en temps de crise, on reporte ses achats sur des produits de première nécessité, il n’y a rien d’étonnant à voir les industries du divertissement plonger plus que les magasins Leader Price … allez donc savoir pourquoi…).

Au sujet de la Neutralité du Net, faut il légiférer ?

« La neutralité du Net n’est pas négociable« , mais le député souligne que si on laisse faire, ce sont les FAI qui vont imposer leur concept de Neutralité.

Au sujet de la taxe Google …

« taxer google je sais pas comment faire (…) tout le monde produit sur Internet »

Une « taxe Google » dit comme ça c’est complètement stupide, ça ne manque d’ailleurs pas de faire rire Laure de la Raudière autant que nous. Une récente longue discussion avec Alexandre Archambault (Iliad) me donne d’ailleurs l’envie de développer un peu ce sujet (je ferai ça dans un autre billet car la conversation a été très riche), mais Laure de la Raudière donne une piste intéressante dans laquelle des entités majeures de l’Internet, fortes consommatrices d’infrastructures pourraient participer au financement des réseaux en bonne intelligence (et sans légiférer, il y a moyen de faire déjà beaucoup de choses, en bonne intelligence). Le meilleur levier serait une volonté gouvernementale d’accueil de ces acteurs pour équilibrer les infrastructures des services au niveau mondial par relocalisation géographique. Tout le monde serait gagnant.

Au sujet de la couverture THD sur l’ensemble du territoire

« La solution ultime c’est la fibre pour tous ». Le constat de Laure de la Raudière sur la capacité de financement d’une infrastructure full fibre est réaliste, très pertinent, elle nous donne des pistes intermédiaires avec la couverture 4G.

Vers un ministère du numérique ?

Laure de la Raudière rappelle les nombreux intervenants gouvernementaux qui ont à se prononcer sur les affaires du numérique, il en résulte sur un arbitrage du premier ministre et des décisions que l’on connait, aboutissant à des textes ni faits ni à faire, inapplicables et fort couteux pour un résultat NUL (vous avez vu combien de condamnés pour contournement de DRM suite à la la loi DADVSI vous ?… ne cherchez pas il n’y en a eu AUCUN … on a légiféré pour protéger un truc stupide qui a finbalement été abandonné par les industriels eux même, le coût de cette blague n’a même pas été évalué et le gouvernement refuse en bloc d’être transparent sur les effets de DADVSI … on peut le comprendre vu le flop).

Un ministère du numérique, ou tout simplement un secrétariat d’Etat qui ferait son travail, serait un plus indéniable, et je rejoins parfaitement la député de la Raudière sur ce point.

A propos de la gouvernance d’Internet Laure de la Raudière plaide en faveur d’une « gouvernance ONUsienne », ce qui est loin d’être une bétise.

Ce qui m’énerve dans tout ça …

L’UMP, par le biais de cette interview, démontre qu’il dispose de gens cortiqués qui n’ont JAMAIS été écoutés. Pourquoi HADOPI a t-elle été confiée à Christine Albanel alors que l’on découvre aujourd’hui des gens bien plus compétents qu’elle sur ces questions ? Laure de la Raudière apporte des arguments valables et démontre qu’elle maitrise parfaitement son sujet. Dans ces conditions on s’interroge sur la pertinence d’ériger le ministère de la Culture en législateur du Net, comme si on confiait la fiscalité au Ministère des affaires étrangères… La politique menée par Nicolas Sarkozy fleurie d’incohérences de ce genre, on veut faire vite, donc on fait n’importe quoi. Personne dans l’entourage présidentiel ne semble parvenir à calmer les ardeurs qui poussent le gouvernement à faire des cadeaux comme HADOPI aux industries culturelles en se tirant une balle dans le pied qui va couter cher à tout le monde.

Laure de la Raudière m’a quand même redonné quelques espoirs mais il est évident, qu’elle comme d’autres ne suffiront pas à raisonner certains dirigeants totalement déconnectés, il en faudrait une centaine comme elle pour y parvenir.

A quoi sert Nathalie Kosciusko-Morizet ?

C’est avec une certaine amertume que j’écris ce billet. Quand Nathalie Kosciusko-Morizet a été nommée à la place de Besson au secrétariat d’État à l’Économie Numérique il y aura de ça un an le 15 janvier prochain, je dois vous avouer que j’attendais beaucoup d’elle, j’ai même accueilli avec bienveillance sa nomination, sachant la personne intelligente et à peu prêt compétente sur le sujet … manque de bol, ce n’est pas le courage politique qui l’étouffe, dressons un bilan de son année sur les 3 dossiers les plus chauds du Net avec du numérique et de l’économie dedans…. vous allez voir, c’est pas spécialement glorieux.

Déploiement de la fibre optique

La fibre optique est le grand chantier des des 5 prochaines années claironne t-on depuis 2005, le plan Numérique 2012 nous en a mis plein les mirettes en annonçant un nombre d’abonnés au très haut débit de plusieurs millions en 2010. Voici le vrai bilan :

  • Orange a stoppé ses déploiements depuis plus d’un an et refuse de poser du multifibre dans les immeubles (l’opérateur préfère poser une seule fibre qu’il louera aux autres opérateurs recréant ainsi son monopole sur les non dégroupés ADSL). L’ARCEP a beau taper du poing sur la table, Orange ne veut rien entendre et souhaite ne rien faire tant que le législateur ne se sera pas prononcé sur la question (et vu le calendrier parlementaire c’est pas avant 2011).
  • Actuellement la France est le 12e pays européen en nombre d’abonnés très haut débit, loin derrière des pays comme la Lettonie et même l’Italie…. une honte, un tiers monde numérique.

Nathalie Kosciusko-Morizet n’est jamais intervenue sur cette question alors que le très haut débit est un enjeu majeur pour les professionnels comme pour les particuliers, un nouveau pan de l’économie numérique qui promet de nombreuses applications, de nombreux services d’une nouvelle génération.

HADOPI / HADOPI 2

Le dossier sur lequel tout le monde attendait NKM, c’était HADOPI. En dehors d’une déclaration où elle avoue savoir contourner les mesures que la Haute Autorité va mettre en place et avoir déclarer se positionner dans « l’après HADOPI », NKM ne s’est jamais exprimée sur ce dossier, il s’agit d’un ordre de la présidence. NKM s’est donc docilement exécutée, pas une bribe de réflexion de sa part sur le sujet… consternant. HADOPI, nous le voyons encore aujourd’hui avec les vœux de Nicolas Sarkozy où le Président appelle au filtrage du Net ou à la taxation des revenus publicitaires des acteurs du Net. Pas un mot, pas une préconisation, rien … le H de Hawai. Et pour cause, ce dossier a été confié au ministère de la Culture (et oui c’est très logique, Nicolas Sarkozy appelle toujours le  Macdonald du coin quand il veut commander des sushis) alors qu’il menace directement l’économie numérique dans son intégralité. La consigne de Nicolas Sarkozy à NKM sur le dossier HADOPI est claire comme de l’eau de roche et peut se résumer à ça : « si tu l’ouvres tu gicles ».

LOPPSI et Filtrage du Net

Après HADOPI et l’ARJEL, LOPPSI sera le prétexte à rendre le filtrage des contenus et des sites web obligatoire avec toutes les conséquences que celà peut avoir d’un point de vu dommages collatéraux (on sait que le filtrage BGP a tendance à faire un peu trop de zèle et à filtrer des sites parfaitement légaux sous prétexte qu’ils sont hébergés sur le même serveur que l’un des sites que l’on souhaite filtrer). Là encore, sur le filtrage, pas une seule étude d’impact n’a été demandée et NKM ne s’est jamais exprimée, elle n’a jamais donné son avis, n’a même surement jamais cherché à freiner les délires de ses petits camarades … NKM est bien dans le secret des dieux, elle sait que tout ceci n’est pas du tout destiné à faire la chasse aux pédophiles… ça n’a pas l’air de la perturber plus que ça.

Mais que fait exactement NKM ?

  • NKM Tweete et superpoke ses friends Facebook,
  • NKM se balade à San Francisco,
  • NKM nous bassine avec son serious gaming dont tout le monde se cogne.

Le secrétariat d’État de NKM ressemble à s’y méprendre à un emploi fictif. Si NKM a été placée ici pour faire la potiche, la moindre des délicatesses pour le contribuable serait qu’elle donne sa démission.

La fibre optique de Bouygues me donne des boutons

minitelEt Hop, Bouygues Télécom (AKA TF1 2.0) se lance dans la fibre optique. Outre le nauséabond mélange des genres « je produis du contenu et je m’assure de fournir des tuyaux où je serai le seul pouvoir administrer et vendre mes contenus, toi l’internaute tu te TAIS et tu CONSOMME », Bouygues a « logiquement » fait le choix de s’adosser au réseau de Numericable qui ne propose aucun upload (5Mb là ou la fibre, la vraie, propose un débit symétrique à 100 mégas, et bien au delà). Certes, Numéricâble qui dispose déjà d’infrastructures dans les immeubles a pris une avance manifeste à déployer son retard technologique … du FTTB, en s’appuyant sur son réseau coaxial pour les derniers mètres. Mais la fibre de  Bouygues via Numéricâble, ça a la couleur de la fibre, ça annonce des downloads qui ressemblent à la fibre, mais ce n’est pas de la fibre … c’est du Minitel 2.0 avec du TF1 dedans.

Très franchement, je préfère conserver ma connexion ADSL.

— Errata : il s’agit bien de 5Mb et non de 5Mo —

Merci Jérôme 😉