De ces voleurs qui tuent les artistes

Marc Guez

Quand on entend Nicolas Sarkozy qui entend « sauver la création », on se dit qu’elle est en très grand danger. Il faut avouer que pour la musique, ce n’est pas tout à fait faux. Si l’industrie du disque n’est pas aussi moribonde qu’on aimerait nous le faire croire, les artistes, eux s’apauvrissent bel et bien avec la dématérialisation des supports.

Voici la répartition moyenne d’un titre vendu pour 0,99€ :

  • 0,61 € pour la maison de disques
  • 0,19 € de TVA
  • 0,07 € reviennent à la Sacem
  • 0,06 € pour le distributeur (le site Web)
  • 0,03 € de frais divers à répartir entre services de Télécommunications, licence technique de gestion et frais bancaires
  • 0,03 € pour l’artiste

On peut effectivement fustiger les internautes, mais à la lecture de ces chiffres, j’ai un peu de mal à définir les internautes comme la cause réelle d’une menace pour les créateurs. En outre si la carte musique jeune promise par Nicolas Sarkozy venait à voir le jour, vous savez maintenant où passera l’argent public… une scandaleuse perfusion, ni plus, ni moins.

On peut donc continuer à policer l’internet comme l’appelle Marc Guez en utilisant des technologies de reconnaissance de contenus, mais il est évident que même ça… et bien ça ne permettra pas aux artistes de vivre mieux. 1 euro le titre, pour un fichier numérique, c’est aussi cher qu’un titre matérialisé sur un support. La seule différence, c’est bien la répartition. La où un artiste touche entre 1,2 et 2 euros par album, il vois ses revenus en valeur fondre de manière spectaculaire sur des fichiers numériques alors que les frais de distributions sont quasi inexistants. Les maisons de disques se taillent la part du lion.

En dehors du fait que j’ai sincèrement l’impression que les maisons de disques prennent les artistes pour des cons, c’est surtout l’intervention de Marc Guez dans l’émission Revu et Corrigé qui motive l’écriture de ce billet. Manque de chance pour lui, il s’est retrouvé face à Fabrice Epelboin, du coup il n’en ramène pas lourd avec une argumentation qui frise le ridicule… comme au moment où il nous ressort sa liste de 53 artistes en faveur d’HADOPI.

Vers la 56e minutes Marc Guez expose encore une fois un plaidoyer en faveur du Deep Packet Inspection en commettant deux trois erreurs factuelles. Le monsieur semble assez persuadé que le Deep Packet Inspection, ou l’écoute généralisée des communications destinée à filtrer les échanges de fichiers « illégaux » sur le Net, est bien la solution aux maux de l’industrie du disque… ce qui est assez gonflé quand on on découvre les chiffres que vous venez de lire.  Marc Guez conclu enfin sur un calcul savant où il nous expliquer qu’il perd de l’argent en valeur… comme le montre une fois de plus les chiffre ci-dessus. Je sens qu’on va reparler de la SCPP très prochainement.

  • Visionner la vidéo (à partir de la 48e minute) / Format Silverlight
  • Pour les linuxiens, la voici dans un format encore plus pourri (wmv) mais qui fonctionne une fois les codecs installés

25 réponses sur “De ces voleurs qui tuent les artistes”

  1. C’est bien de remettre les choses en ordre de temps en temps.

    Les pirates sont en haut de la pyramide. Intouchables et solidaires.

    En bas c’est tout le contraire.

    1. Il y a un plugin pour linux (moonlight) mais il est franchement pas stable, j’ai du me résigner à installer des plugin crades, voici le link rstp du wmv que tu peux qget puis lancer avec un player propre une fois les codecs sales installés : http://bit.ly/aWEy3r

      1. Merci pour ce lien, désagréable mais à peu près utilisable.

        Pour ce qui est de Moonlight, il n’est pas seulement instable, mais également et surtout, il n’implémente pas PlayReady, la composante DRM de Silverlight 2.0 que Microsoft n’a pas autorisé Miguel à inclure dans Moonlight. Or il semblerait bien que Pluzz utilise Playready, à en croire le serveur de licence interrogé lors d’un usage de Pluzz depuis Windows:
        http://playready.ftvi.yacast.net/playready/ftvi/rightsmanager.asmx

        Quand je pense que ça a été payé par mes impôts, j’ai envie de vomir…

  2. J’apprécie ce type, Fabrice Epelboin. Calme, posé et sachant argumenter intelligemment sans se laisser démonter.
    Après mon commentaire sur l’émission, les parents ne paieront pas pour de la musique. Ils paieront le même prix pour un vpn afin d’être moins à risque vis à vis de l’HADOPI.

  3. Heu… Les sept centimes de la Sacem, ils ne sont pas censés être reversés à l’artiste à moment donné ?
    Ou alors s’agit-il d’un cas particulier avec accords spéciaux ?

  4. Je n’ai pas encore vu/écouter la vidéo en question, cependant la répartition de0,61 € pour la maison de disques n’est pas juste une dîme alloué à la maison de disque sans aucun rapport avec ce qu’il « produit ».

    Certes le taux est – entre guillemet – énorme, par rapport à celui de l’artiste, cependant, il ne faut pas oublier que l’artiste ne paye pas:
    – les studios d’enregistrement,
    – les ingénieurs qui vont travailler sur l’album (notamment au niveau du studio),
    – les musiciens annexes,
    – tout le marketing et le commercial en plus des publicités pour le vendre,
    – les déplacements de ce dernier (parfois la bouffe et l’hôtel)
    – les plateaux diverses pour les concerts de celui-ci, et les techniciens qui montent ou gère l’ensemble du matériel,
    – les avances sur recette (et oui!)

    Et j’en oublie certainement dans l’affaire.

    Pour en avoir produit un (en vrai pas en faisant du mymajorbidulecompanymercipapa..), je peux assurer que l’artiste paye rarement une part de ce gâteau.

    Je vais pas défendre les maisons de disque, je pense qu’ils ont bien abusé depuis ces dernières années, mais il faut relativiser et ne pas penser que tous sont clean et la major est le méchant petit canard unique de l’histoire.

    1. (bon, désolé pour les « er » qui devrait être des « é » et vice-et-versa; et autres fautes diverses… je me flagellerai en place publique, promis)

    2. Les artistes ne payent pas ? C’était une boutade, j’espère ? Ils payent bien au contraire aux centuples et à crédit ces premiers frais sur leurs ventes, et lorsque ce sont les producteurs extérieurs comme on le voit sur le net avec cette mode des producteurs associés, ce sont eux et ces producteurs qui sont les dindons de la farce, car les rétributions et les contrats sont les mêmes… Et quand bien même ils ne payaient pas, tu ne crois pas que les maisons de disques les oublient un peu sur les recettes ?

      1. > Ils payent bien au contraire aux centuples
        > et à crédit ces premiers frais sur leurs
        > ventes,

        Quels frais ? Je viens de te dire que les studios étaient payé par les producteurs 🙂

        > Et quand bien même ils ne payaient pas,
        > tu ne crois pas que les maisons de disques
        > les oublient un peu sur les recettes ?

        Tu oublies aussi que beaucoup d’artiste « s’en foutent », je veux dire que les chiffres ne les intéressent pas. Pour en croiser quelques-uns, les papiers, les contrats, les factures, et même parfois ce qu’il y a sur leur compte bancaire, ils ne veulent pas les voir, ni savoir. C’est pour cela qu’une bonne partie se font « avoir » comme tu dis. Je mettrais en pole-position notre cher Johnny national qui le dit lui-même: ca l’emmerde, il préfère déléguer.

        Mais déléguer, cela à un coût. (ou alors il faut me présenter les personnes qui bossent gratuitement, je suis preneur)

        Je ne dis pas que les majors sont innocentes, loin de là, ils savent en profiter parce qu’en face, tu as la plupart du temps des « gamins »; Bosses une fois avec un « artiste », tu verras que c’est impossible, tu as l’impression de bosser avec un enfant qui n’a aucune obligation, aucune contrainte, et j’en passe et des meilleurs.

        Rare sont les « artistes » qui sont un peu carré et ceux sont ceux là qui se font pas avoir par les majors.

        Après quand tu parles de la co-production (ce que tu appelles « producteurs externes »), je ne connais pas assez les deals MyMajorCompany et les artistes signés. Je ne pourrais donc pas m’avancer là-dessus. A une chose près: les artistes sont toujours content de se faire signer, même si c’est par MMC 🙂 (c’est aussi pour cela qu’ils négocient très mal lors de leur premier contrat)

    3. Ben moi je fais de la zique en autoproduction, j’ai eu deux propositions de contrats de labels (1 français, 1 USA), et je peux t’assurer que les deux me laissent payer la production, et me proposent des avances remboursables sur la promotion. Donc je paye tout. Il y a même des clauses du style je n’ai pas le droit de refuser une opération promo, mais à mes frais bien sûr… qu’ils aillent se faire voir, on n’a plus besoin d’eux

      1. > les deux me laissent payer la production,
        > et me proposent des avances remboursables
        > sur la promotion.

        Je dis pas le contraire 🙂
        En général, c’est ce qu’il se passe, maintenant, c’est pas une règle établie dans le marbre de tous les contrats établis entre chargé de production et artiste(s).

        Pour ton cas, je supposerais très fortement que les labels essayent de minimiser leurs coûts de production. Tu as le droit de refuser (encore heureux 🙂 et peut-être qu’ils te feront une autre proposition s’ils te jugent assez intéressant pour leurs marchés.

        PS: je n’ai pas compris le « clauses du style je n’ai pas le droit de refuser une opération promo, mais à mes frais bien sûr », tu entends quoi par là ? que si tu refuses une opération pour la promotion de ton album, le label te fait payer « quelque chose » ?

  5. Moi j’attends vraiment que les mettent un bouton donate paypal sur leurs sites…

    Je suis prêt à donner de l’argent aux artistes, mais pas à tout les autres !

  6. Et les producteurs qui ont longtemps été naturellement associés aux distributeurs (et même encore aujourd’hui), tu crois qu’ils avancent comme ça gracieusement ? Ils veulent du ROI, et dans les contrats que ces « pauvres » artistes signent, c’est marqué ; ils remboursent à crédit sur leurs ventes ou se voient pendant un certains temps attribuer une part en pourcentage plus maigre, ce qui revient au même… Alors, ils ne payent pas ? Mais LOL. Il n’y a que sur Internet que ces majors sont heureuses de voir naître ces producteurs associatifs dont je fais hélas partie, et dont j’ai déjà parlé sur mon blog. C’est gratuit pour elles, chacun à sa part constante, mais surtout les majors prennent leur part en tant que simples distributeurs et dieu sait que la distribution numérique, ça coûte super cher, hein ? Du coup, elles se réservent quelques règles, histoire d’en profiter un peu plus. http://neosting.net/musique/akamusic-change-les-modeles-de-productions.html

    1. Je crois comprendre que tu me réponds en dehors du thread, je vais donc compléter.

      > ils remboursent à crédit sur leurs ventes ou se
      > voient pendant un certains temps attribuer une
      > part en pourcentage

      Oui, c’est ce qu’on appelle une avance sur recette. C’est donc normal que l’artiste ne reçoivent rien ou moins pendant une durée définie suivant le montant de l’avance et la durée et cela contractuellement (c’est à dire que l’artiste n’est pas pris à dépourvu s’il a lu correctement son contrat)

      Si je devais extrapoler avec un travail classique, c’est comme si tu demandais 1 an de salaire d’avance à ton boss. Après cela, il est normal que tu ne sois pas payer pendant 1 an (si c’est le cas dans ta boite, je veux bien déposer un CV 🙂

      Pour le reste, quand tu parles de la co-production « associatifs » (MyMajor, Akamusic que tu évoques notamment), je ne m’avancerais pas comme je te l’ai déjà exprimé, car je ne connais pas assez (et j’ai franchement pas envie d’investir du temps pour comprendre leurs véritables business-models… aka « pas celui qu’on montre au public » mais celui qu’on montre aux investisseurs 😉

      1. Donc, contrairement à ce que tu laisses entendre dans ton premier message, les artistes paient.

        Ils n’avancent pas la monnaie nécessaire mais remboursent lorsqu’ils touchent des pépettes. Évidemment ce système comporte des risques puisqu’un artiste peut faire un flop et le producteur ne revient pas sur la somme avancée. Je suppose que depuis le temps, les producteurs ont sûrement appris à mutualiser les coûts.

        De plus ton exemple sur le travail est faux : ce n’est pas que l’année de salaire que l’employé rembourse mais aussi le mobilier et l’utilisation des outils qui lui permettent de travailler pour son employeur.

        1. Bon, vous avez décidé de ne pas comprendre (ou de faire semblant de ne pas comprendre), je vais pas vous y obliger hein 🙂

          > Donc, contrairement à ce que tu laisses
          > entendre dans ton premier message, les
          > artistes paient.

          Tu mélanges deux trucs.
          Mon premier message faisait mention des nombreux coûts que l’artiste laissait à la charge de la maison de production.
          Ces coûts, ce dernier doit bien le récupérer quelque part.
          Donc c’est « presque » normal d’avoir un 0,61€ sur la répartition.

          Sur la deuxième partie, je parle d’avance sur royalties.
          Soit l’artiste renonce à cela, auquel cas il aura 100% des royalties qui lui est du; soit il renonce pas auquel cas c’est normal qu’il ne touche rien ou presque rien pendant X temps (ce qui correspond a un échelonnement sur la durée)

          > Ils n’avancent pas la monnaie nécessaire mais
          > remboursent lorsqu’ils touchent des pépettes.

          Ca dépend de quoi tu parles;
          Si tu parles des avances sur royalties, ce n’est pas qu’il n’a pas d’argent, c’est juste qu’il demande des royalties sur des éléments qui n’a toujours pas été vendu (c’est notamment pour cela que je faisais une extrapolation avec une avance sur salaire: on te donne de l’argent avant que tu es fait le travail)

          > les producteurs ont sûrement appris à mutualiser les coûts.

          De ma lucarne, ce qu’il se fait le plus souvent, c’est qu’un artiste bien connu, sert à faire vivre 4, 5, voire 6 artistes beaucoup moins.

          > De plus ton exemple sur le travail est faux

          Si j’utilise le terme extrapolation, c’est pas pour faire joli dans mon post:
          « Extrapolation (nc, nf): induction d’une conclusion de portée générale à partir de données insuffisantes ou incomplètes »
          ou
          « Extrapolation (nc, nf): L’extrapolation désigne l’utilisation d’une règle en dehors de son domaine d’application, ou le fait de faire une supposition à partir d’autres situations ou d’états d’ames qui ne sont pas complètement similaires. »

          De plus, tu as mélangé encore l’avance sur royalties et les coûts inhérents à la production (ce sont deux choses différentes)

  7. Moi, ce qui me fait marrer, c’est qu’ils essayent de nous faire gober des trucs comme au temps de l’ORTF !

    L’Homme n’a pas plus de mémoire qu’à cette époque mais il a un outil qui, lui, n’oublie rien : Internet.

    Alors, quand ils disent des conneries et le contraire le lendemain (Qui est aussi une connerie), ben ca se voit… Même plusieurs années après.

  8. Ces chiffres de répartition sont un peu plus connus depuis les débats DAVSI en 2006.
    Et encore nous avons là des chiffres où l’auteur gagne encore quelque chose.
    Il y a des domaines (sonneries, streaming, à vérifier) où l’essentiel est pour la maison.
    Sur ce sujet de qui est le vrai voleur, j’aime à rappeler la grève des scénaristes US il y a 2 ans en lutte contre leurs éditeurs là aussi afin de faire valoir leurs droits à rémunération lors d’une commercialisation de leur oeuvre sous une forme dématérialisée. Sans cette grève, très dure, ils ne toucheraient rien, que dalle encore aujourd’hui alors que c’est un marché d’avenir.
    Il était question que les acteurs s’y mettent également mais Clooney est intervenu 🙂

    Tout cela pour bien constater quele matraquage, lecopinage, les relations consensuelles, ça aide énormément à faire passer et faire croire à la vérité que l’on veut faire ingurgiter au bas peuple.

    Les retraites suivent ce même principe : y’aurapas d’argent si on ne repousse pas.
    Où sont les chiffres ?
    Si on suit le même principe pour la sécu on la fait disparaître alors !
    Et, pendant ce temps, ceux-là mêmes qui votent se gardent de beauxpetits avantages à qq centaines de millions.
    Db

    Db

  9. Ces chiffres de répartition sont un peu plus connus depuis les débats DAVSI en 2006.
    Et encore nous avons là des chiffres où l’auteur gagne encore quelque chose.

    Il y a des domaines (sonneries, streaming, à vérifier) où l’essentiel est pour la maison.
    Sur ce sujet de qui est le vrai voleur, j’aime à rappeler la grève des scénaristes US il y a 2 ans en lutte contre leurs éditeurs là aussi afin de faire valoir leurs droits à rémunération lors d’une commercialisation de leur oeuvre sous une forme dématérialisée. Sans cette grève, très dure, ils ne toucheraient rien, que dalle encore aujourd’hui alors que c’est un marché d’avenir.
    Il était question que les acteurs s’y mettent également mais Clooney est intervenu 🙂

    Tout cela pour bien constater que le matraquage, le copinage, les relations consensuelles, ça aide énormément à faire passer et faire croire à la vérité que l’on veut faire ingurgiter au bas peuple.

    Les retraites suivent ce même principe : y’aura pas d’argent si on ne repousse pas.
    Où sont les chiffres ?
    Si on suit le même principe pour la sécu on la fait disparaître alors !
    Et, pendant ce temps, ceux-là mêmes qui votent se gardent de beauxpetits avantages à qq centaines de millions.
    Db

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