Il faudra du temps, beaucoup de temps pour tenter de démêler le vrai du faux, les supputations des faits, les bons mots de diplomates des positions officielles des États. Aujourd’hui, le monde a découvert les petits dessous de la diplomatie, dans toute sa brutalité. Prenons un peu de recul et imaginons un seul instant de telles révélations en pleine guerre froide. Bien plus que les petites piques de diplomates vis à vis des dirigeants de l’Union Européenne, c’est vers le Moyen-Orien et l’Asie que le monde entier doit avoir les yeux rivés. Les documents diffusés aujourd’hui par Wikileaks font états de missiles d’origine Nord-Coréenne en possession de l’Iran, et de la construction d’un second site nucléaire à Qom en plus de celui de Natanz qui a été cette année la cible de l’une des attaques informatiques les plus élaborées jamais observées. L’Iran est bien en train de s’armer et ceci, en toute logique, inquiète.
Si l’impact du Cablegate pourrait être relativement limité entre les pays occidentaux, c’est bien entre les pays du monde arabe que les relations diplomatiques pourraient être amenées à évoluer. La réaction de Téhéran vis à vis de l’Arabie Saoudite ou du Bahrein, deux pays qui ont demandés à Washington d’intervenir pour mettre fin au programme nucléaire iranien, reste la grande inconnue. Les révélations sur la Turquie, ou le rôle des banques dans le financement d’alQaida pourraient également ajouter une couche de complexité à la situation et créer de nouvelles tensions.
En Asie, du côté de la Corée du Nord, on serait tenté de dire que la mise en évidence de collaboration avec l’Iran sur ses programme d’armement pourrait avoir une influence sur la position de Pékin, dans un contexte déjà particulièrement tendu suite à l’escarmouche entre la Corée du Nord et la Corée du Sud la semaine passée. La Chine va donc jouer un rôle crucial et devra assumer son rôle de pacificateur pour ne pas que la région entière se transforme en poudrière.
Le grand perdant de l’histoire ce soir, c’est l’administration américaine, mise à mal, sa diplomatie va devoir regagner la confiance de ses partenaires et pourrait de fait se trouver au chômage technique pendant de longs mois. Les effets commerciaux non plus ne sont pour l’instant pas non plus mesurés mais on sait que la diplomatie est intimement liées avec les échanges de nature commerciale entre États. Sans confiance, pas de business.
Les jours à venir devraient être passionnants en terme de géostratégie politique, le Cablegate va bien changer la donne, mais bien malin celui qui peut aujourd’hui affirmer pour qui et dans quelle mesure.