Les majors continuent les pleurnicheries à propos d’Apple

emiConséquence inéluctable de l’inadaptation des majors face aux défis de l’Internet, elles sont en train de perdre la bataille de la distribution dématérisalisée. Le grand vainqueur, pour le moment, c’est Apple avec son iTunes store, ce qui agaçait déjà la SACEM il y a bientôt deux ans. C’est maintenant à EMI d’y aller de son petit couplet contre le géant américain à l’occasion de la publication de son rapport financier. EMI met en garde contre « la dépendance substantielle envers un nombre restreint de magasins de musique en ligne, en particulier l’iTunes Store (…)» Et ZDNet de souligner qu’EMI n’a rien à proposer et ne reverra sans doute pas les montants exhorbitants qui sont demandés à de nouveaux acteurs pour que ces derniers puissent accèder au catalogue.

Bref les majors se plaignent d’une situation dont elles sont les seules responsables, et très franchement, c’est pas moi qui vais m’apitoyer sur leur sort. J’en viens même à espérer qu’elles continuent à donner dans le répressif sans rien proposer en contrepartie, à ce rythme, on en sera débarrassé définitivement dans quelques années.

Laurent Petitgirard (SACEM) sur LCI tire à boulets rouges sur son futur patron … Steve Jobs

Laurent Petitgirard est le président du conseil d’administration de la SACEM que l’on ne présente plus, nous a fait festival sur LCI. La cible ? Apple ! Apple, avec iTune propose un modèle commercial qui hérisse le poil des maisons de disque et de la SACEM. Mais voilà en terme de ventes, Apple a pris tellement d’ampleur pendant que les majors se demandaient comment elles allaient continuer à vendre des cd, qu’il est devenu le premier distributeur de média numériques (ou va le devenir)… ou comment une entreprise qui n’a rien à voir avec la musique va bientôt apprendre aux majors leurs métier.

Et tout ceci agace Laurent Petitgirard qui commet une monumentale bourde en fustigeant une entreprise qui a assez de liquidités pour s’offrir 2 majors et imposer un nouveau modèle économique, laissant ces majors sur la touche. Et quand Laurent Petitgirard est agacé … il se lâche :

« Lorsque l’on discute avec iTunes, on discute avec des gens qui vendent des machines ! Apple se fout de la musique, ils n’en ont rien à faire ! iTunes gagne peut-être un peu d’argent mais ce qu’ils veulent c’est simplement vendre des iPod : ce sont des fabricants de matériel. C’est un alibi ».

Première bourde : Apple gagne peut être un peu d’argent avec iT(h)unes, mais il en gagne énormément tout court et il est tout à fait capable aujourd’hui de s’offrir le dernier maillon manquant à sa chaîne : la production de contenu. Soyez tranquilles, il ne le fera avant que les 4 survivants ne se soient un peu plus entre-tués et qu’ils aient finis d’enterrer le peu de valeur ajoutée qu’ils produisent encore. Ce qui nous amène à la seconde boulette.

Seconde bourde : dire qu’Apple se fout des contenus est une ânerie. Là encore, vu que les majors ne font plus leur métier (découvrir de nouveaux talents) et préfèrent investir dans des niaiseries de Star Academy parce que c’est bien plus rentable, il ne va pas falloir venir pleurer quand Apple ou un autre (au hasard Google) va s’offrir une bonne partie du catalogue mondial. Et le pire c’est qu’ils n’auront pas besoin de croquer une major vu qu’ils tiendront la distribution.

Troisième bourde : opposer constructeurs et producteurs mène à … RIEN, c’est à dire tout ce que vous avez réussi à faire en 15 ans d’Internet : RIEN … de la merde. Un petit refresh de l’oeuvre des « ayants droit » pour soigner l’amnésie de Mr Petitgirard s’impose:

  • « en fermant Napster on va tuer le p2p » … 15 ans après, les échanges par p2p représentent presque la moitié des échanges mondiaux en volume.
  • « on va faire interdire la licence GPL » … la licence GPL sous laquelle sont publiés de logiciels de p2p constitue une brique essentielle de l’informatique mondiale, cher monsieur Petitgirard, qui plus est inscrite au patrimoine mondial de l’humanité. Je doute qu’armé de votre exception culturelle vous en veniez à bout un jour, mais continuez, l’espoir fait vivre.
  • « Avec les DRM on va empêcher le piratage » : bilan, effondrement accru des ventes de cd puisque ceux vendus ne permettent pas une écoute nomade (autoradio, players mp3 etc …-
  • « 74% des français sont favorables à la riposte graduée » : un projet tellement plébiscité que l’amendement 138 a été adopté avec 84% des suffrages afin de faire barrage au projet de loi Création et Internet…
  • « Avec l’HADOPI, les vente de cd vont repartir » : qui peut croire à ça :), d’ailleurs à la SACEM personne n’y croit et c’est pour ça qu’on prépare le terrain pour la taxe des FAI. Monsieur Petitgirard n’y croit d’ailleurs pas lui même. Le temps que l’HADOPI se mette à fonctionner et les CD ne seront plus qu’un mauvais souvenir, comme les cassetes audio.
  • Pourtant, le président du conseil général de la SACEM ne s’en tient pas là et en remet une couche en parlant « interopérabilité » … un mot qui dans sa bouche et celle des majors a toujours provoqué des fous rires chez les professionnels du disque à l’époque ou je travaillais pour cette industrie :

Ensuite, Apple se fout du monde musical et personne n’y peut rien. « Le problème, c’est que le gouvernement le plus décidé qui soit d’aller vers l’interopérabilité, ne peut forcer Apple à rendre son logiciel compatible avec les autres supports. Cela dépasse les compétences de la filière et du gouvernement. Les majors du disque ne sont pas forcément mes amies, mais elles sont confrontées à un constructeur qui se moque des auteurs, des interprètes, et des producteurs ».

Voilà que la SACEM aimerait qu’iTunes soit « compatible » … mais compatible avec quoi ? avec des « autres supports » … hum il semble que monsieur Petitgirard ai un peu de mal avec le vocabulaire technique, il veut rendre compatible iTunes avec des cd, des vinyles, les k7 ? à moins qu’il ne souhaitait parler d’autres âneries des majors qui auront duré quelques années comme, en vrac :

  • créer son propre format audio
  • créer son propre site web pour court-circuiter la distribution (comme toutes les majors on essayé de le faire).
  • créer ses propres systèmes de protection

… je serais juste curieux de savoir combien de millions ont été investis dans ces trois derniers points … en pure perte. QU’elle le veuille ou ou non, l’industrie du disque a déjà perdu la bataille de la distribution, l’époque où les commerciaux d’Universal pouvaient se pointer dans un magasin pour une implantation en imposant des quantités au distributeur, c’est terminé. Il faudra maintenant faire avec, ou mourir.